Comment nous sommes devenus fans de l'Abitibi Témiscamingue Le récit de notre road-trip sur la route des explorateurs en mai 2015
C'est vrai qu'il faut dépasser quelques préjugés et faire un peu de route pour atteindre l'Abitibi Témiscamingue. Disons surtout qu'il faut prendre une direction moins conventionnelle que la plupart des voyageurs, ce qui est plutôt fait pour nous plaire! Mais une fois sur place, cela devient rapidement une évidence : il y a ici quelque chose d'unique, de lumineux, de sincère et spontané. Une énergie particulière.
Suivez pas à pas notre voyage et découvrez comment nous sommes devenus totalement fans de l'Abitibi Témiscamingue!
Après une première nuit à Ottawa, nous voilà partis pour le Témiscamingue. La destination se mérite : une petite journée de route (nous empruntons rarement les lignes droites!) le long de la magnifique rivière des Outaouais, sur la frontière entre le Québec et l'Ontario. Nous optons pour le "raccourci" de Mattawa – qui ne fait pas nécessairement gagner du temps, mais propose un parcours en forêt magnifique, qu'on imagine grandiose aux couleurs de l'été indien. Et nous voilà arrivés à Témiscaming, charmante petite ville conçue selon le modèle des cités jardins britanniques. Température estivale pour cette mi-mai : 25°! D'emblée, nous plongeons dans des histoires d'eau, de barrages, de conduites...
Un lieu de rencontre stratégique entre le fleuve St Laurent et la Baie d'Hudson
Nous sommes sur le territoire ancestral des Algonquins! En toute logique, notre découverte commence avec quelques représentants de la Première Nation de Wolf Lake, qui nous parlent de leurs traditions. Et nous expliquent les expéditions guidées en canot-camping qu'ils proposent, notamment sur la rivière des Outaouais et le lac Kipawa. Nous passons une soirée riche d'échanges en leur compagnie, autour d'un excellent repas fait de doré et d'orignal. Puis nous nous installons pour la nuit au bord du lac Kipawa! La vie est belle!
Deuxième jour : nous passons de +25° à +5° mais nous sommes prêts pour une journée de découvertes! En matinée, nous optons pour une promenade de long de la superbe rivière Kipawa, pour voir la Grande Chute! Vraiment impressionnante! Nous récoltons les printanières "têtes de violons" (jeunes pousses de fougères comestibles) et rejoignons la région de Ville-Marie. Josée nous accueille chaleureusement au Lieu Historique national du Fort Témiscamingue/Obadjiwan, pour une visite passionnante, entre histoires de rivalités pour le contrôle des fourrures et légendes de la forêt enchantée. Nous découvrons plusieurs scénographies historiques qui nous éclairent sur les divers bâtiments de cet ancien poste de traite, leurs fonctions, et les modes de vie à l'époque où colons européens et autochtones échangeaient des biens de nécessité contre des fourrures.
Nous nous installons pour la nuit dans un superbe chalet au bord du Lac Témiscamingue ... sous quelques flocons de neige! Allez, demain, ce sera le "juste milieu", on annonce 15°!
Un esprit de fiers bâtisseurs!
Troisième jour, nous nous levons avec quelques restes de neige au sol... En route pour Angliers, et la découverte d'une autre facette du territoire : l'histoire du flottage du bois et de l'exploitation forestière.
Au bord du lac des Quinze, nous visitons l'exposition et montons à bord du T.E. Draper, le plus important remorqueur de bois en service entre 1929 et 1972 pour la Canadian International Paper (C.I.P.). Un peu plus loin, au chantier Gédéon, la reconstitution d'un camp de bûcherons, avec cinq bâtiments et un sentier en forêt, nous fait revivre la vie quotidienne des hommes des bois.
La température monte, et nous poursuivons la route vers Notre Dame du Nord, jeter un coup d’œil au Fossilarium. Ici, au centre d'interprétation ou sur le terrain, on découvre la formation et la géologie du Témiscamingue à travers les fossiles.
Encore quelques degrés ... La lumière est belle et nous invite à nous perdre (volontairement!) dans les routes de campagne (les rangs) pour s'imprégner des paysages vallonnés! Après quelques photos de fermes et d'un pont couvert, nous arrivons en fin d'après-midi au magnifique marais Laperrière, l'endroit idéal pour parfaire ses connaissances de la faune et de la flore des milieux humides! Balade magnifique et instructive, guidée par Marie-Paule : les tortues peintes sont ici les vedettes, et les fougères à l'autruche forment un tableau impressionnant! C'est à nouveau l'été, et nous terminons la journée autour d'un bon plat de terroir, concocté par un chef créatif, et d'une bonne bière. Puis retrouvons notre chalet en bord du Lac Témiscamingue.
Au quatrième jour, nous quittons le Témis – nous avons maintenant bien compris qu'il s'agissait d'une région "à part entière" - et nous dirigeons vers l'Abitibi! D'autres paysages, une autre histoire. Mais toujours des gens chaleureux, qui nous ouvrent grand leur porte et nous parlent avec fierté de leur toute jeune région!
Rouyn et Noranda (qui fusionneront par la suite) furent fondées en 1917 suite à la découverte d'un riche gisement de cuivre sur les rives du lac Osisko. La ville n'a pas encore cent ans, mais est considérée comme la meilleure ville québécoise pour son esprit entrepreneurial! Plaque tournante vers les richesses hydroélectriques, minières et touristiques du Nord canadien, la ville possède aussi une riche vie culturelle! Nous faisons halte au site historique "magasin Dumulon" : le premier magasin général du canton de Rouyn. Fondé par la famille Dumulon en 1924, il accueille toujours les visiteurs et propose en saison une visite guidée pour découvrir toute l'histoire des pionniers!
Avoir "son" chalet au bord de "son" lac, le bonheur simple et parfait!
Nous faisons quelques réserves de nourriture avant de prendre la route pour le Parc national d'Aiguebelle. Retour à la nature! A Aiguebelle, nous découvrons un véritable bijou de patrimoine naturel et culturel. Martin nous a conseillé un chalet "rien que pour nous" au bord d'un lac "rien que pour nous", France nous décrit les coins incontournables que nous devons visiter! C'est décidé, même avec une température qui replonge, nous allons nous attarder dans ce petit paradis! Marcher sur des milliards d'années, là où les eaux se séparent, ... voilà l'expérience qui nous attend!
Nous observons de jolies marmites et autres traces du passage des glaciers. Nous traversons la longue passerelle suspendue à 22 mètres au-dessus du lac La Haie. Nous suivons le sentier d'interprétation des Paysages, et dévalons une falaise en empruntant un escalier hélicoïdal. Nous traçons l'orignal (en vain, c'est un fantôme!) aux abords du lac Loïs. De retour au chalet (nous aurons le privilège d'en tester deux, puisque nous resterons deux nuits), un bon feu nous fera bien vite oublier que la température reste "frette". Séjourner à Aiguebelle, cela ressemble vraiment au bonheur parfait !
Sixième jour, nous partons pour Amos, le point de départ de la colonisation de l'Abitibi en 1910 (c'est dire si la région est jeune!). Le premier village de cabanes rustiques, bâties avec le bois coupé pour défricher le site, a fait place à une ville moderne! Un coup d’œil à l'imposante cathédrale, mais nous ne nous attardons pas. Pas que le coin ne nous plaise pas, loin de là! Mais nous avons eu l'occasion, lors d'un précédent voyage, de vivre un séjour inoubliable au bord de la rivière Harricana, chez les Algonquins de Pikogan, à 3 km d'Amos. Nous choisissons donc de nous concentrer sur de nouvelles découvertes!
C'est une part peu connue de l'histoire locale que nous découvrons au Camp de détention "Spirit Lake" à Trécesson. Ici, à 12 km d'Amos, en pleine Première Guerre mondiale (entre 1915 et 1917), le Canada a interné 1.200 ressortissants de pays ennemis. A cette époque, la colonisation de l’Abitibi débutait à peine. Le camp de détention a dès lors joué un rôle primordial dans le développement d’Amos, permettant la construction d’infrastructures qui serviront de base à l’établissement d’une ferme expérimentale du gouvernement fédéral. Un centre d’interprétation historique, situé sur les lieux du camp, dévoile le quotidien des prisonniers, de leurs gardiens ainsi que des 60 familles majoritairement ukrainiennes qui ont vécu en périphérie du camp. Une visite surprenante!
Des histoires de passion!
Nous poursuivons notre route vers le très réputé Refuge Pageau, qui recueille les animaux sauvages orphelins, perdus ou blessés. Ceux-ci sont soignés et remis en liberté dans la nature le plus tôt possible. Lorsque la libération est impossible, ils sont gardés à plus long terme et chouchoutés. Le Refuge abrite, entre autres, des orignaux, des ours, des loups, des renards, des cerfs de Virginie, des ratons laveurs ainsi que plusieurs espèces d’oiseaux de proie. Sur les traces de Michel Pageau - le créateur du refuge, mieux connu chez nous comme étant "l'homme qui parle aux loups" - c'est son petit-fils qui nous emmènera pour une visite insolite des lieux! Sa relation avec les animaux est étonnante (il prend un porc-épic dans ses bras sous nos yeux ahuris), son enthousiasme communicatif! C'est décidément une belle histoire de famille!
Étape suivante : nous prenons la direction de Senneterre, vaste territoire sauvage qui dispose d'un nombre impressionnant de pourvoiries, au cœur d'immenses forêts! Nous rencontrons Mr le Maire, qui nous parle avec enthousiasme du train touristique La Tuque-Senneterre, et des nombreuses possibilités mises en place dès cet été pour favoriser le déplacement des habitants (et touristes) entre la Haute Mauricie et l'Abitibi. Nous l'écoutons d'une oreille attentive, soucieux de proposer cette escapade abitibienne à nos nombreux clients qui fréquentent déjà la Mauricie !
Nous partons ensuite par les routes forestières à l'est de Senneterre, rejoindre l'une des plus belles pourvoiries de la région, dans un écrin de collines plantées d'épinettes et de bouleaux argentés. Ici, au milieu de nulle part, nous avons rendez-vous avec les brochets, les dorés, les orignaux et les ours! C'est que l'Abitibi Témiscamingue est aussi une destination de chasse et pêche réputée. Les nombreuses pourvoiries offrent – tant aux familles, qui souhaitent taquiner le poisson et observer la faune, qu'aux véritables amateurs de chasse et pêche - des services professionnels et un cadre sécurisant en pleine nature sauvage. Ici aussi, nous prolongerons quelque peu notre séjour : la cuisine succulente et créative de Maxime, la sympathique partie de pêche avec Daniel, la plage du Lac Trévet, le soleil qui revient ... les bonnes raisons ne manquent pas !
De l'or plein les veines!
Nous reprendrons la route forestière deux jours plus tard, pour notre dernière étape déjà, et non la moindre! Nous voilà à Val d'Or. Nous y découvrons "La Cité de l'Or" qui nous plonge réellement au cœur de l’exploitation d’une mine d’or qui fut la plus riche du Québec pendant quelques décennies. Dès 1923, la découverte d’un filon d’or attire ici les explorateurs. En 1932, la Lamaque Gold Mines prend les choses en main et l'exploitation du gisement commence réellement en 1935. Fermée en 1985, la mine Lamaque a été depuis convertie en un centre d’interprétation qui propose des expériences absolument exceptionnelles. Nous décidons de toutes les tester. Entre-temps, la température est remontée à 30° et nous sommes presque soulagés d'enfiler des vêtements de travail et de descendre sous terre, à 91 mètres, dans l'ancienne mine Lamaque. Ici, la température est constante (8°) et nous faisons l'expérience du noir total! Nous croisons quelques étudiants : c'est que la mine sert aussi de lieu de formation pour les futurs mineurs!
Nous visitons les bâtiments de surface de l'ancienne mine, pour apprendre de quelle manière on suivait l’évolution des travaux sous terre (cage d’ascenseur des mineurs, benne chargée de transporter le minerai à la surface, salle du treuil) ainsi que le laboratoire d’analyse, où l’on nous initie à la transformation de l’or.
Nous découvrons au travers d'une exposition hors norme - "De l'or plein les veines" - l'histoire des mineurs et le rôle important qu’a joué la mine Lamaque aux plans économique, social et culturel. Conçue comme un parcours d’embauche, l'expérience nous permet de tout savoir des métiers de la mine... et de voir si nous avons le profil pour l'un d'eux. Qui sait, peut-être chercherons-nous un jour une reconversion !
Avant les premières gouttes de l'orage, nous aurons le temps de nous promener dans le village minier historique de Bourlamaque, pour découvrir toute la vie sociale des travailleurs et des dirigeants de la mine. Dans ce site classé site historique, nous découvrons 60 maisons en bois rond (et toujours habitées!) ainsi que les maisons de pension des mineurs célibataires, le dispensaire, et les demeures (d'une autre taille, est-il utile de le préciser) des dirigeants de la compagnie minière. Un patrimoine inestimable,
Après la visite, il nous reste à boire une bonne bière à la microbrasserie locale, "Le Prospecteur". Pour cette dernière nuit en Abitibi, nous logerons au cœur du village historique, dans une ancienne maison de pension, qui accueillait les mineurs venus d'Europe. Histoire de prolonger jusqu'au bout l'atmosphère palpitante de la ruée vers l'or!
Ce n'est pas la fin de l'histoire!
Dès le lendemain, nous reprendrons la route pour Montréal. Nous optons pour un B&B au coeur de la ville, et découvrons que les propriétaires sont originaires ... de l'Abitibi Témiscamingue. Ils ne nous poseront donc pas cette terrible question "Mais qu'est-ce que vous êtes bien allés faire là-bas?". Eux, ils savent! Nous passerons la soirée à échanger nos souvenirs respectifs. La boucle est bouclée. Le Témiscamingue et l'Abitibi (deux régions qui ne se ressemblent pas, mais s'assemblent si bien!) nous laissent totalement sous le charme! C'est décidé! Dès 2016, l'un de nos mini-groupes accompagnés "été indien" leur sera consacré! Qu'on se le dise!
Texte : Carine Lambé/Go to Canada - mai 2015
Photos : Go to Canada